Le lendemain matin, la sonnerie du dortoir retentit pile à 7h00. Ren, les cheveux ébouriffés, ouvrit la porte en baillant. Aya se tenait là, parfaitement réveillée, chemisier impeccable, regard aiguisé.
« Bonjour. » dit-elle sans sourire. « Préparez-vous. Test aujourd'hui. Vous avez cinq minutes. Je déteste attendre. »
Elle entra sans attendre de réponse. Ren referma la porte et murmura :
« C'est quoi cette femme… un robot ? »
« Vous avez quatre minutes. » lança Aya depuis le salon.
Tout le monde bondit en direction des salles de bain.
Ils la suivirent jusqu'au rez-de-chaussée, dans une grande salle d'entraînement entourée de miroirs. Le sol brillait, la sono trônait au centre. Aya posa sa tablette et se tourna vers eux.
« On commence par le test de danse. » déclara-t-elle.
Elle appuya sur un bouton. De la musique pop énergique emplit la salle.
« Faites comme si vous étiez déjà un groupe d'idols. Impressionnez-moi. »
Ren inspira brusquement, avança… et ses pieds s'emmêlèrent avant même le premier rythme. Il s'étala contre le miroir dans un bruit sourd.
« Je… je vais y arriver ! » grogna-t-il.
Riku tenta une rotation, mais ses jambes croisées le trahirent : il trébucha droit sur Kaito qui esquiva de justesse.
Souta, lui…
On aurait dit qu'il invoquait un démon. Bras qui partaient n'importe où, expression possédée, gestes incohérents.
« Euh… Souta ? » murmura Hikaru, inquiet.
« J'essaye ! » cria-t-il.
Hikaru se débrouillait. Pas parfait, mais il suivait le rythme, ses mouvements avaient même un certain charme naturel.
Et Kaito…
Aya se figea.
Le brun aux yeux verts, large sourire, dansait comme s'il était né sur scène. Souple, coordonné, timing parfait. Une aisance déconcertante.
Quand la musique s'arrêta, Aya applaudit. Vraiment.
« Impressionnant, Kaito. »
L'intéressé bomba le torse. « C'est peut-être parce que j'ai fait… hm… de l'aérobic… sur YouTube ? »
Elle continua :
« Et Hikaru, ce n'est pas mauvais. Très prometteur. »
Puis son regard devint glacial.
« Pour les autres… c'est honteux. Je n'ai jamais vu une telle catastrophe. Vous êtes censés sauver votre vie, pas participer à une kermesse. »
Ren serra la mâchoire. Riku baissa la tête. Souta leva timidement la main.
« J'avais l'impression d'être… en transe… »
« Ça se voyait. Et c'était affreux. »
Après une courte pause, Aya prit de nouveau sa tablette.
« Test de chant. Un par un. »
Ren se décida à commencer.
Il se racla la gorge, inspira… et une voix divine sortit de sa bouche. Grave, chaude, vibrante, parfaitement maîtrisée.
Un silence stupéfait.
« Ren… » souffla Hikaru. « Je savais pas que tu pouvais faire ça. »
Ren détourna le regard, gêné.
« Moi non plus… enfin pas comme ça. »
Aya enfin sourit. Un vrai sourire.
« Voilà un vrai talent. »
Puis Hikaru passa.
Il ouvrit la bouche…
Et un son atroce s'en échappa. Une plainte plus qu'une note.
Kaito éclata de rire.
« On dirait un chat qu'on réveille ! »
« Je… j'ai sûrement juste mal commencé. » dit Hikaru en toussant.
« Non. Tu chantes très mal. » conclut Aya.
Ensuite, Riku , avec un air confiant se mit à chanter.
Une casserole aurait eu plus de charme. Il était totalement perdu.
Souta s'avança. Il tenta d'ouvrir la bouche… et ce qui en sortit ressemblait plus à une incantation maudite qu'à une chanson. On aurait dit qu'il essayait d'invoquer Cthulhu.
« STOP ! » cria Aya.
Elle se pinça l'arête du nez. « Souta. Ce que tu viens de faire doit rester interdit. »
Souta pleura presque. « J'essayais de vibrer… »
Enfin, Kaito s'avança, confiant.
« Je vais chanter Mon Petit Soda Pop des Sajas Boys ! »
Il prit sa pose…
Et ouvrit la bouche.
Le silence assassina la salle.
Il chantait faux. Horriblement. On aurait dit qu'il tentait d'imiter un dauphin en détresse.
Aya cligna lentement des yeux.
« Comment peut-on danser si bien… et chanter si mal ? »
« J'ai… plein de talents cachés ! » protesta-t-il.
« Celui-là devrait rester caché. »
Ayant évalué le potentiel de chacun, elle se plaça au centre.
« Maintenant, un mini-entraînement. Suivez mes mouvements. »
Elle exécuta une courte chorégraphie rapide et stylée.
Les cinq garçons tentèrent de la suivre…
Et échouèrent de manière spectaculaire.
Ren glissa encore.
Riku s'emmêla.
Souta fit un mouvement étrange qui fit peur à tout le monde.
Hikaru presque réussit mais perdit l'équilibre à la dernière seconde.
Kaito était le seul presque correct mais trébucha quand Souta lui rentra dedans.
Aya resta immobile dix secondes.
« … Je suis maudite. »
Quelques heures plus tard, le groupe était affalé autour de la table du dortoir, dévorant tout ce qu'Hikaru avait cuisiné la veille. Ils mangeaient comme si le test leur avait pris dix ans de vie.
Aya, elle, tapait sur son ordinateur sans lever les yeux.
Riku finit par demander :
« Mademoiselle Aya… vous faites quoi ? »
« Je crée votre page web officielle. » répondit-elle sans s'arrêter. « Et je prépare les documents pour la création de votre agence. »
« Notre… agence ?! » s'étrangla Hikaru.
« Oui. Je serai votre manageuse. Et votre présidente. Puisqu'apparemment personne ne peut diriger cinq bras cassés. »
Kaito protesta la bouche pleine. « Eh ! On fait de notre mieux ! »
« C'est ça le problème. »
Elle fit claquer une touche du clavier.
« Il ne me manque qu'une chose : le nom de l'agence. »
Les garçons se regardèrent.
Ren lança : « Phoenix Entertainment ! »
Kaito : « Non ! Sparkle Five ! »
Riku : « Oni Productions. »
Souta : « Euh… Stunade Entraiment ? »
Un silence.
Puis Aya.
« NON. »
Souta baissa la tête comme un chiot puni.
Les propositions fusèrent, de plus en plus ridicules.
La discussion dégénéra. Ils se lançaient des oreillers, criaient des « le mien est mieux ! » comme des enfants.
Aya soupira.
« Bande de nuisibles… »
Elle tapa quelque chose d'un ton sec.
« L'agence s'appellera AstraNova Entertainment. Fin de la discussion. »
Les garçons s'arrêtèrent et opinèrent.
« … C'est stylé en fait. » murmura Hikaru.
« Très classe. » ajouta Ren.
« Je savais que j'étais géniale. » dit Aya sans modestie.
Elle referma enfin son ordinateur.
« Maintenant, réfléchissons au nom du groupe. »
Un silence.
Puis cinq voix commencèrent à parler en même temps.
Aya passa sa main sur son visage.
« …On n'est pas encore sortis de l'auberge. »