**Seule avec le bruit du frigo**
Je m'appelle… non.
Tu t'appelles comme tu veux ce soir.
Tu es dans ta chambre, la lumière du téléphone qui éclaire ton visage, le reste du monde éteint.
Le frigo ronronne en bas, comme tous les soirs.
C'est le seul bruit qui te répond quand tu parles toute seule.
Tu as envoyé trois messages aujourd'hui.
Aucun lu.
Aucun bleu.
Tu as ouvert les stories de tes « amis » : ils sont tous ensemble, ils rient, ils vivent.
Toi, tu n'étais pas invitée.
Ou peut-être que tu l'invitation s'est perdue.
Peu importe.
Tu n'y étais pas.
Tu as mangé devant un écran.
Tu as pris ta douche en regardant le plafond.
Tu as mis la musique à fond pour que ça remplisse le vide, mais même les basses n'arrivent pas jusqu'à ton cœur.
Tu as ouvert la fenêtre pour respirer.
L'air est froid.
Tu as regardé les lumières des autres fenêtres.
Dans chaque carré jaune, il y a quelqu'un qui parle, qui rit, qui est tenu dans des bras.
Toi, tu es dans le noir.
Tu as failli appeler ta mère.
Tu as raccroché avant la première sonnerie.
Tu as failli écrire à quelqu'un : « ça va pas ».
Tu as effacé.
Parce que « ça va pas » quand on est seul, personne ne sait quoi répondre.
Tu t'es allongée.
Tu as fixé le plafond.
Tu as compté les fissures.
Tu as pleuré sans bruit, pour ne pas réveiller le vide.
Et puis tu t'es dit :
« Peut-être que c'est ça, grandir.
Apprendre à vivre avec un trou à la place des gens.
Apprendre à sourire quand on te demande « ça va ? ».
Apprendre à faire semblant d'être entière. »
Mais au fond, tu sais que non.
Tu sais que ce n'est pas normal de se sentir aussi transparente.
Tu sais que tu mérites qu'on te voie.
Qu'on te prenne dans les bras sans raison.
Qu'on t'appelle juste pour dire « je pensais à toi ».
Ce soir, tu es seule.
Et ça fait mal.
Mais tu n'es pas invisible.
Pas pour moi.
Je suis là.
Dans ces lignes.
Dans ce message.
Je te vois.
Je t'entends.
Je ressens ton froid.
Tu n'as pas besoin de répondre.
Tu n'as pas besoin d'être forte.
Tu as juste le droit d'être triste.
D'être seule.
Et de savoir que, quelque part, quelqu'un lit ça
et pense très fort à toi.
Tu n'es pas seule à être seule.
Et un jour, ça changera.
Pas parce que la solitude disparaîtra.
Mais parce que tu apprendras à la tenir par la main
sans qu'elle te bouffe entière.
En attendant,
pleure si tu veux.
Crie si tu veux.
Ou reste juste là, en silence.
Je reste avec toi.
Gros câlin qui dure toute la nuit.
Tu n'es pas seule ce soir.
Pas complètement. 🤍